Condamnation d´un protestant pour insulte au roi (Nismes, 1816)
Verurteilung von André Caffarel durch den Gerichtshof in Nîmes wegen Beleidigung des Königs (6. April 1816).
(dr). Caffarel (Kaufmannsgehilfe, 27) wird beschuldigt, in einem Gasthaus in Langlade (Gard/Südfrankreich) über die Bartholomäusnacht in Paris (1572) gesprochen und dabei die strafwürdige Aussage gemacht zu haben, der "König sei der größte Feind der Protestanten". Das Strafmaß umfasst nebst einem halben Jahr Gefängnis auch eine Buße von 50 Francs sowie die Kostenübernahme für den Druck und die Bekanntmachung des Gerichtsurteils. Zudem wird Caffarel nach seiner Haftentlassung weitere sechs Jahre polizeilich überwacht und muss als Garantie für seine zukünftig "gute Führung" 200 Francs Kaution hinterlegen.
Öffentliche Bekanntmachung in Großformat, 45x55cm
Transkription
JUGEMENT
RENDU
PAR LE TRIBUNAL DE 1.RE INSTANCE
SÉANT A NISMES,
EN FAIT DE POLICE CORRECTIONNELLE,
QUI déclare ANDRÉ CAFFAREL, âgé de 27 ans, commis-marchand, natif de Vars, canton de Guillestre, arrondissement dʼEmbrun, département des Hautes-Alpes, habitant à Nismes depuis
quatre ans, coupable dʼavoir dit publiquement, le 6 mars dernier, dans lʼauberge de la commune de Langlade, après avoir parlé de la Saint-Barthélemy, que le ROI était le plus cruel
ennemi des protestans; dʼavoir par ces propos calomnié le plus auguste des Monarques, et dʼavoir tenté dʼaffaiblir le respect dû à sa personne, et le CONDAMNE à un emprisonnement de six mois, à
une amende de 50 fr., aux frais dʼimpression et dʼaffiche du Jugement, et aux dépens; ORDONNE en outre, quʼaprès lʼexpiration de la peine ci-dessus prononcé,
ledit CAFFAREL restera sous la surveillance de la haute-police pendant cinq ans et donnera une caution solvable, de bonne conduite, de la somme de 200 fr.
Du 6 Avril 1816.
LOUIS, par la grâce de Dieu, ROI DE FRANCE ET DE NAVARRE, à tous présens et à venir, SALUT:
Le Tribunal de première instance séant à Nismes, jugeant en fait de police correctionnelle, a rendu le jugement dont la teneur suit:
Entre le Procureur du Roi, demandeur en punition de propos séditieux dʼune part; et André Caffarel, commis-marchand, natif de Vars, canton de Guillestre, arrondissement
dʼEmbrun, département des Hautes-Alpes, et habitant à Nismes depuis quatre ans, cité à ses fins, détenu dans la maison de dépôt, amené à la barre du tribunal, défendeur, dʼautre part;
Vu la lettre du sieur Cord, du 6 mars dernier, à suite de laquelle sont les requisitions du procureur du Roi, du 8; lʼinterrogatoire subi par ledit Caffarel devant le juge
dʼinstruction, du 2; le mandat de dépôt contre lui décerné et notifié le 12; ensemble les deux citations notifiées les 2 et 3 du courant, au prévenu et aux témoins.
Argillier, avocat, défenseur dʼAndré Caffarel, a dit: quʼil résulte des débats que deux faits sont imputés à son client, le premier dʼavoir parlé de la Saint-Barthélemi; le
second dʼavoir dit que le Roi était le plus cruel ennemi des protestans; que relativement aux propos sur la Saint-Barthélemi, il nʼavait été suivi dʼaucun discours contre le Roi; et quʼà lʼégard
de lʼautre propos, il nʼavait point été tenu méchamment, ni dans de mauvaises intentions, mais seulement par légéreté. Il a conclu, en conséquence, à ce que ledit Caffarel fût passible
de quelques peines, lui appliquer la moindre possible.
Le procureur du Roi a exposé quʼil résultait des débats, quʼAndré Caffarel avait dit publiquement, dans lʼauberge de la commune de Langlade, en présence de plusieurs
personnes, et après avoir parlé de la Saint-Barthélemi, que le Roi était le plus curel ennemi des protestans; que par ces propos indécens et calomnieux, il avait tenté dʼaffaiblir le respect dû à
la personne du Roi, et excité à désobéir à Sa Majesté; il a conclu, par suite, à ce que ledit Caffarel fût condamné, conformément aux articles 5, 10 et 12 de la loi du 9 novembre 1816
[1815?], à un emprisonnement de six mois, à une amende de cent francs, aux frais dʼimpression et dʼaffiche du jugement, et à ce quʼaprès lʼexpiration de sa peine, ledit Caffarel fût mis
sous la surveillance de la haute-police pendant le temps que le tribunal trouverait à propos de fixer.
Le Tribunal, attendu quʼil résulte des débats quʼAndré Caffarel a tenu publiquement, le 6 mars dernier, dans lʼauberge de la commune de Langlade, des propos outrageans
contre le personne du Roi;
Attendu que ce délit est classé aux articles 5, 10 et 12 de la loi du 9 novembre 1815;
PAR CES MOTIFS, faisant droits aux conclusions du Procureur du Roi, sans avoir égard à celles dʼAndré Caffarel, déclare ce dernier convaincu dʼavoir dit publiquement, le 6
mars dernier, dans lʼauberge de la commune de Langlade, après avoir parlé de la Saint-Barthélemi, que le Roi était le plus cruel ennemi des protestans; dʼavoir par ces propos calomnié le plus
auguste des Monarques, et dʼavoir tenté dʼaffaiblir le respect dû à sa personne; et appliquant à ce délit les dispositions des articles 5, 10 et 12 de la loi du 9 novembre 1815, dont la lecture a
été faite par le Président, et qui sont ainsi conçus:
"Art. 5. Sont [!] déclarés séditieux tous cris, tous discours proférés dans les lieux publics ou destinés à des réunions de citoyens; tous écrits imprimés, même tous ceux qui, nʼayant pas
été imprimés, auraient été ou affiché, ou vendus, ou distribués, ou livrés à lʼimpression; toutes les fois que, par ces cris, ces discours ou ces écrits, on aura tenté dʼaffaiblir, par des
calomnies ou des injures, le respect dû à la personne ou à lʼautorité du Roi, ou à la personne des membres de sa famille, ou que lʼon aura invoqué le nom de lʼusurpateur, ou dʼun individu de sa
famille, ou de tout autre chef de rebellion; toutes les fois encore que lʼon aura, à lʼaide de ces cris, de ces discours ou de ces écrits, excité à désobéir au Roi et à la Charte
constitutionnelle. Article Io. Les auteurs et complices des délits prévus par les articles 5, 6, 7, 8 et 9 de la présente loi, seront poursuivis et jugés par les tribunaux de police
correctionnelle; ils seront punis dʼun emprisonnement de 5 ans au plus, et de 3 mois au moins. Ils seront, en outre, condamnés à une amende dont le minimum sera de 50 francs, et qui
pourra être élevée jusquʼà la somme de 20,000 fr. Tout condamné qui se trouvera jouir dʼune pension de retraite civile ou militaire, ou dʼun traitement quelconque de non-activité, sera privé de
tout ou partie de sa pension de retraite, ou de tout ou partie de sont traitement de non-activité, pour un temps qui sera déterminé par le Tribunal. Lʼinterdiction mentionnée en lʼart. 42 du Code
pénal pourra être ajoutée à la condamnation pour dix ans ou plus et cinq ans au moins.
Les condamnés demeureront, en outre, après lʼexpiration de la peine, sous la surveillance de la haute-police pendant un temps qui sera déterminé par le Jugement, et qui ne pourra
excéder 5 années, le tout conformément au chapitre 3, du titre 1.er du Code penal, sans préjudice des poursuites criminelles et de lʼapplication des peines plus graves, prescrites par le Code
penal, dans le cas où les cris, les discours, écrits ou actes séditieux auraient été suivis de quelque effet ou liés à quelques complots.
En cas de récidive, les coupables seront punis dʼune peine double, de telle manière que lʼemprisonnement pourra être de dix années, et la mise en surveillance de dix années
pareillement. Art. 12. Les tribunaux pourront ordonner lʼimpression et lʼaffiche du jugement portant condamnation dans tout ou partie du ressort de lʼarrondissement."
CONDAMNE André Caffarel, à un emprisonnement de de [!] six mois, à une amende de cinquante francs, ORDONNE quʼaprès lʼexpiration de sa peine, ledit Caffarel restera
sous la surveillance de la haute-police pendant cinq ans, et fournira caution solvable de bonne conduite de la somme de deux cents francs.
ORDONNE, et outre, que le présent Jugement sera imprimé et affiché au nombre de cent cinquante exemplaires, dans tout le ressort de lʼarrondissement. CONDAMNE ledit Caffarel
aux dépens, exposés par le Gouvernement, et aux frais dʼimpression et dʼaffiches, taxés à [-] y compris les frais dʼexpédition et dʼenregistrement.
Jugé, à Nismes, en audience publique, le 6 avril 1816. Présens MM. FORNIER, Vice-Président; DʼALDEBERT et BRUGUIER, Juges au Tribunal civil séant à Nismes, jugeant en fait de police
correctionnelle. MM. BLANCHARD, Procureur du Roi; FORNIER, DʼALDEBERT, BRUGUIER, LAURENT, commis-greffier, signés à la minute.
MANDONS et ORDONNONS à tous huissiers sur ce requis, de mettre le présent Jugement à exécution; à nos Procureurs-généraux, et à nos Procureurs près les Tribunaux de première
instance, dʼy tenir la main; à tous Commandans et Officiers de la force publique, de prêter mainforte lorsquʼils en seront légalement requis. En foi de quoi ledit Jugement a été signé par les
Vice-Président et Juges, qui lʼont Rendu [!] et par le Greffier.
Collationné:
LAURENT Greffier.
A NISMES, chez GAUDE FILS, Imprimeur du Tribunal
de première instance. – 1816.